Des milliards de tapis de cheveux (Die Haarteppichknüpfer), par Andreas Eschbach

Aux confins de l'Empire galactique, une tradition séculaire d'une petite planète insignifiante veut que tout homme d'un foyer tisse un tapis pour rendre hommage à l'Empereur lui-même. Mais ce ne sera pas n'importe quel tapis. Oeuvre de toute une vie, le Tisseur devra prendre les cheveux des femmes du foyer (sa femme, sa concubine et même ses filles s'il en a) pour les entremêler suivant un ordre bien précis. Vivant une vie entière grâce à la vente du tapis de son père, il espère que le prix qu'il recevra permettra à son fils de vivre dignement, lui permettant de tisser son propre tapis. Et ainsi de suite... Tous ces tapis sont censés décorer le Palais des Etoiles, où règne l'Empereur. Seulement voilà, certaines rumeurs commencent à dire que l'Empereur est mort...

illustration de Vincent Madras
Quand on tombe sur un premier roman tel que celui-là, on ne peut qu'être admiratif. Sorti il y a près de vingt ans en Allemagne, et en 1999 chez nous (merci à la maison d'édition nantaise L'Atalante pour cette découverte), ce livre a fait couler beaucoup d'encre, surtout pour en dire du bien. Alors, comment  dire quelque chose de nouveau sur ce Des milliards de tapis de cheveux sans avoir l'impression d'arriver après la bataille ? Si je dis que chacun des dix-sept chapitres (et un prologue) sont autant de pièces d'un gigantesque puzzle que le lecteur reconstitue au fur et à mesure de sa lecture, je ne ferais que répéter ce qui a déjà été dit par un chroniqueur de je ne sais quelle revue. Idem si je vous dis qu'Andreas Eschbach tisse un roman comme ses personnages tissent des tapis. Voilà le genre de métaphores pertinentes que j'aurais aimé trouver avant tout le monde.

Je pourrais tout de même dire que ce court livre (à peine plus de 300 pages) se dévore avec une insatiabilité incroyable. Chaque chapitre se lit un peu comme une nouvelle. A tel point que certains se terminent même sur une chute. Tous les chapitres sont liés par l'histoire, qui se déroule dans le système de Gheera, centre de l'Empire galactique. En revanche, on ne peut pas parler ici de fix up, procédé littéraire qui permet, pour un auteur, de lier différentes nouvelles qui se déroulent dans le même univers et d'en faire un roman à part entière en y ajoutant quelques petits textes pour rassembler le tout. Je pense à Bradbury et son De la poussière à la chair... ou à G.R.R. Martin avec Le voyage d'Haviland Tuf. En effet, on sent bien ici que l'auteur allemand à pensé son roman en amont comme une juxtaposition de courtes histoires, de brefs moments de vie, d'instantanés qui, mis bout à bout, finissent par faire sens pour le lecteur. Comme un puzzle en somme. Ah mince, je m'étais interdit de parler de puzzle...

En plus de l'histoire qui est formidable, nous montrant par petites touches l'immensité de l'Empire galactique, le style d'écriture déployé par Eschbach est non moins remarquable. D'autant qu'il s'agit-là, je le répète, de son premier publié. Peut-être aussi est-ce dû à la traduction, signée Claire Duval, mais ça je ne saurais trop en juger. En tout cas, ça amplifie grandement le plaisir de lecture.

Bref, vous l'aurez compris, j'ai beaucoup aimé ce (premier) roman. Andreas Eschbach est une très bonne découverte pour moi (il faut dire qu'il était précédé d'une sacrée réputation) et je crois que je vais prochainement continuer l'aventure avec lui. En effet, la médiathèque de ma ville possède En panne sèche et je crois que je ne vais pas trop attendre pour m'y plonger. A suivre, donc.

Des milliards de tapis de cheveux (Die Haarteppichknüpfer) - J'AI LU - traduction de Claire Duval - 320 pages - 7€ - D.L. : janvier 2010

note : III

A lire aussi les chroniques de Cachou et Lorkhan...

Cette chronique a été réalisée dans le cadre du défi Summer Star Wars II





Commentaires

  1. Ce roman là, j'ai envie de le lire depuis des années sans trouver le temps de m'y mettre véritablement. So many books, so little time ;)

    Bon, j'espère quand même le lire un jour hein !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Cesse immédiatement toutes tes lectures en cours pour te lancer dans celui-ci, tu me remercieras ! Franchement, c'est tout court et ça se lit très facilement. Et à la fin, tu fais : Waow !

      A.C.

      Supprimer
  2. Quelle idée géniale ! Je le lirai à l’occasion ;)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Ah oui, ça fait partie de mes meilleures découvertes récentes. Un bijou !

      A.C.

      Supprimer
  3. Sommet d'ironie, d'amertume et d'absurde.

    Construction pointilliste aux petits oignons, élargissement du champ spatio-temporel proprement vertigineux, chute à tomber...

    Bouquin qui ferait à coup sûr la fierté de n'importe quel auteur du genre.

    Plume, Escrocgriffe, ne vous privez pas de ce pure bonheur de lecture.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Et tu m'as dit, scifictif, que tu ne saurais pas quoi dire sur les bouquins que tu lis ? Franchement, là, les gars et les filles, on ne peut pas mieux vous le vendre, ce livre ! Maintenant, lisez-le !

      A.C.

      Supprimer
  4. Je l'avais aimé à la lecture et encore plus aimé quelques temps après, à froid, en me rendant compte de l'excellence du procédé. Le fond ET la forme. Un bijou (une barrette pour être dans le thème ?).

    RépondreSupprimer
  5. Tout à fait ! Bon, je dois avouer avoir eu un peu (un peu seulement) de mal à comprendre ta phrase entre parenthèses...

    A.C.

    RépondreSupprimer
  6. J'avais beaucoup ce livre, sauf la fin qui pour moi tombait un peu comme un cheveu sur la soupe (oui je sais, les jeux de mots...). Mais je me dis qu'en sachant à quoi s'attendre ça devrait être une chouette relecture.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'avoue que, présentement, je ne me souviens plus exactement de la fin. Sans vouloir couper les cheveux en quatre, bien sûr... ;-)

      A.C.

      Supprimer
  7. Loin de tout ce que l’on connaît dans le genre, ce roman magistral, paru en 1995, est un OVNI de la science-fiction. Il est passionnant. Il fait partie de ces ouvrages que je relis régulièrement, juste pour le plaisir. C’est un véritable coup de cœur, une histoire délicieusement mélancolique : le Palais des Etoiles, ainsi que celui des Larmes, m’ont marquée à tout jamais…

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. N'est-ce pas ? J'avoue moi-même avoir été subjugué par ma lecture comme rarement. C'est un roman qui laisse une trace indélébile dans l'esprit du lecteur, malgré (ou à cause de) sa concision.

      A.C.

      Supprimer

Enregistrer un commentaire