Les Solariens (The Solarians), de Norman Spinrad

Les humains sont en train de perdre la guerre contre les Doglaaris, cette espèce "extra-terrestre" belliqueuse. En effet, les "Dogs" ont un avantage sur les humains, le nombre des vaisseaux inter-galactiques qu'ils possèdent, et qu'ils n'hésitent pas à perdre par centaines dans le simple but de gagner la guerre. Le seul espoir de l'espèce humaine ? Forteresse Sol... Une part de l'humanité primordiale qui, trois cents ans plus tôt, a choisi de se replier sur le système solaire d'où a essaimé les êtres humains. Et si cette Forteresse Sol n'était qu'une légende ? Et s'ils avaient finalement décidé de ne plus s'intéresser à leurs frères...

illustration de Manchu
Quand on commence l'oeuvre d'un auteur, on se demande si le mieux n'est pas de lire son tout premier roman. Ce n'est pas toujours évident, d'autant que ledit bouquin n'est pas forcément disponible. Mais là, il s'agit d'un auteur encore vivant, ce qui aide je pense à sa visibilité. D'autant qu'il a été souvent ré-édité sous nos latitudes. Les Solariens est donc le tout premier roman de Norman Spinrad, un auteur très engagé à gauche (voire un peu plus), qui n'a pas toujours trouvé sa voie (sa voix ?) dans son pays d'origine. Voici deux ans, j'ai d'ailleurs pu brièvement échanger quelques mots avec lui. C'est un homme charmant, réservé, qui cache sous ses dehors de petit bonhomme fragile une force incroyable...

Je sais de source sûre que ce roman n'est pas le meilleur écrit par Norman Spinrad. Je suis tout à fait prêt à croire cet avis autorisé qui est issu de quelqu'un qui, visiblement, connait bien l'oeuvre du Monsieur. Bien sûr, on pourrait arguer qu'il s'agit-là d'un premier roman (même si, avec la chronique littéraire précédant celle-ci, l'argument n'est pas forcément recevable) pour expliquer ce fait. Mais je ne vais pas faire toute cette chronique sur les faiblesses de ce Les Solariens. Il ne le mérite pas je trouve.

Publié pour la toute première fois en 1966, ce roman se situe dans un contexte socio-politique assez particulier. En effet, aux Etats-Unis, nous sommes en plein dans le flower power (à un an du fameux Summer of Love), mouvement de contestation de la jeunesse américaine contre, entre autres choses, l'intervention de leur pays au Viet-Nâm. Parce qu'en lisant Les Solariens, cela m'a paru évident que Spinrad parlait de ça. Une guerre interminable et stupide où l'état-major continue à engager le combat, malgré l'inéluctabilité du résultat final, somme toute catastrophique. Et puis, ces Solariens, ce sont les hippies bien sûr ! Éloge de l'amour libre, usage de stupéfiants... Et surtout une philosophie du pacifisme à toute épreuve. Il est clair que l'auteur américain voulait, par ce court roman (à peine plus de 220 pages), mettre sa pierre à l'édifice du mouvement anti-guerre qui gonflait dans son pays. Quoi de mieux qu'un roman de science-fiction qui, sous couvert d'ailleurs et de demain, ne parle que d'ici et de maintenant. Le maintenant du Norman Spinrad de 1966.

Juste un petit mot en passant sur la couverture, qui n'est vraiment pas une réussite. Je suis pourtant un grand fan du travail de Manchu, mais je trouve que là, il est vraiment passé à côté, même si on voit bien ce qu'il voulait faire. La preuve que même les plus grands peuvent, parfois, avoir des défaillances.

Alors Les Solariens n'est peut-être pas le chef d'oeuvre de la littérature du XXème siècle, mais il se laisse tout à fait lire et il nous fait réfléchir tout en nous projetant loin de notre quotidien. Il s'agit d'un bon roman de space opera tel qu'on aimerait en lire plus souvent. Pas prise de tête dans la forme, mais avec ce minimum de fond pour ne pas laisser un arrière-goût d'inutilité à sa lecture.

Les Solariens (The Solarians) - Denoël - Présence du Futur - traduction de Michèle Charrier - 224 pages - D.L. : avril 2000

note : II

A.C. de Haenne

chronique réalisée dans le cadre du Summer Star Wars II :






Commentaires

  1. Si tu veux un très bon pavé de Spinrad sur un thème complètement improbable (le stand-up a la télé américains), essaye "He Walked Among Us" (j'me souviens plus du titre français).

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    1. Traduit par Sylvie Denis et Roland C. Wagner, il s'agit de "Il est parmi nous". Je l'ai et j'ai bien sûr prévu de le lire. Mais avant, j'aimerais bien conserver un ordre chronologique de mes lectures des romans de Spinrad que j'ai : "Jack Barron et l'éternité", "Rêve de fer", "Livre d'Or" et, finalement, "Il est parmi nous". D'autres, bien sûr, pourraient s'intercaler entre-temps.

      A.C.

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  2. Bonne idée de lire dans l'ordre chronologique.
    Ceci dit attention, l'ordre de rédaction peut différer de celui de parution ("Il est parmi nous" est apparemment paru près de 15 ans après sa rédaction).

    Mais pas de panique, il y a une solution pour pallier ce problème de linéarité : ingérer de "L'Herbe du temps".

    "L'Herbe du temps" ?

    Oui.

    "L'Herbe du temps".

    (génialissime nouvelle qui figure dans son Livre d'Or)

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    1. Alors peut-être devrais-je commencer par cette nouvelle ?

      A.C.

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    2. A ta guise, Antoine.
      A ta guise.

      Devant un texte d'une telle ampleur, je suis tant saisi que les mots me manquent. Aussi je préfère laisser parler plus sage (et plus capable) que moi.

      Ubik : «Une construction impeccable pour un effet maximum. Alors là, je dis chef-d'œuvre ! Assertion non négociable.»
      (source : http://yossarian.over-blog.com/article-des-nouvelles-de-norman-spinrad-54975504.html)

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  3. Et si Ubik a parlé, c'est donc vrai !

    A.C.

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  4. Lu, il y a des siècles, en Marabout. Ouvrage classique, sympa, mais le vrai Spinrad démarre avec Jack Barron et l'éternité.
    SV

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